DÉSERTIFICATION DES SOLS : SALTA OU L’EXEMPLE DE CE QU’IL NE FAUT PAS FAIRE

Par Marie O’Neill

Selon les chiffres divulgués par la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (UNCCD), près d’un milliard de personnes seraient directement affectées par la désertification des sols[1]. Il s’agit donc d’un problème extrêmement important auquel on ne prête pas toujours une attention suffisante. L’exemple de Salta ainsi que les chiffres parlent d’eux-mêmes et permettent de discerner la gravité de la situation actuelle.

La désertification des sols est l’un des trois plus grands défis qui pèsent actuellement sur les capacités de l’environnement à répondre à nos besoins ainsi qu’à ceux des générations futures. En effet, les sols représentent l’un des fondements naturels sur lesquels reposent la vie humaine et le développement social. Or, la désertification prend des dimensions alarmantes. Elle atteint aujourd’hui plus de 40% des sols et touche environ 70% de toutes les zones arides soit plus 36 millions de km²[2]. Les Pays En Développement (PED) ainsi que les Pays les Moins Avancés (PMA) dont le besoin accru de se développer joue parfois un rôle destructeur sur l’environnement sont les plus gravement affectés par ce phénomène. Cependant, la détérioration de l’environnement dont la désertification des sols est un exemple poignant, est-elle réellement nécessaire et inévitable dans le but de réduire voir d’éradiquer la pauvreté?

Salta est une région d’Argentine où les conditions offertes par l’écosystème étaient rêvées pour l’agriculture et l’élevage encore au début du XXème siècle[3]. Elle se trouve entre les plaines salines de Rosario de la Frontera, une vaste zone Andine et le Chaco, grande province d’Amérique du Sud. La terre fertile et les précipitations étaient adaptées à l’usage agricole des terres. Cependant l’exploitation forestière très poussée qu’a subit cette région ainsi que l’élevage de masse qui s’y est développé ont ouvert le chemin à l’érosion ainsi qu’à la détérioration de l’écosystème. La surexploitation agricole ne va, par la suite, que faire empirer les choses.
Aucune technique de préservation, de cycles de rotation des terres cultivables, des pâturages ainsi que des forêts, ne fut mise en place. Les années 60 représentèrent donc une sorte de point limite à partir duquel le sol commença réellement à subir une érosion destructrice. Les agro-systèmes, à leur tour montrèrent rapidement de tragiques signes d’épuisement. Ce dernier avait été masqué par la hausse considérable de la productivité lors des premières années. Néanmoins, l’essoufflement lié au surmenage se fait profondément sentir : cette région d’Argentine souffre désormais de la chute de plus de 50% des rendements qu’elle a connue auparavant[4].

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photo 1 : http://www.tripadvisor.com/LocationPhotos-g312821-Province_of_Salta_Northern_Argentina.html

Le phénomène à Salta ainsi que dans le reste du monde étant extrêmement rapide et intense, des mesures doivent urgemment être mises en place dans le but de solutionner ce problème majeur. Dynamiser le développement régional, créer de nouvelles technologies adaptées aux conditions particulières devant lesquelles les producteurs se trouvent confrontés sont les enjeux non pas de demain mais d’aujourd’hui. Effectivement, on parle actuellement de la dégradation très grave de plus de ¾ des terres arides d’Amérique latine et d’autres cas tout aussi dramatiques que celui-ci s’ajoutent à cette liste à laquelle il semble improbable de mettre un point final[5].
Heureusement, le travail a déjà commencé. Lors du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992, la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (UNCCD) a été élaborée. Il s’agit là d’un instrument multidimensionnel tout particulièrement intéressant de part ses capacités juridiques permettant de protéger les écosystèmes et parvenir à un développement humain durable. La coopération au niveau mondial est l’un des facteurs des plus importants dans le processus de résolution de la désertification des sols. La France, par exemple, va consacrer, en 2006, un budget de 60 millions d’euros pour la résolution de ce problème, le site officiel du Comité scientifique Français sur la désertification nous en informe. Néanmoins s’assurer que les politiques du commerce et de l’environnement se soutiennent l’une l’autre n’est pas chose aisée. Les nombreuses théories du développement montrent bien comme les intérêts industriels et commerciaux ont largement tendance à primer sur le ménagement de l’environnement.

En 2002, le sommet de Johannesburg a permis d’octroyer un nouvel élan à l’UNCCD en la reconnaissant comme un «instrument d’éradication de la pauvreté»[6]. La désertification des sols est désormais mise sur le un pied d’égalité avec les autres objectifs du millénaire mondiaux (AME), comme la sauvegarde de la biodiversité ainsi que la couche d’ozone.

Ainsi, bien que nous nous trouvions devant un enjeu de taille, nous pouvons voir que les choses ont été prises en main au niveau mondial. Il ne reste plus qu’à attendre de voir si les pays du Nord seront capables de dépasser leurs égoïsmes nationaux et si le Sud comprendra bientôt que si la surexploitation de notre environnement permet des bénéfices et rend son développement plus facile, il ne s’agit là que d’une solution à très court terme et les problèmes qui surgissent par la suite ne valent certainement pas la peine d’être risqués. Ainsi ce n’est pas l’éradication de la pauvreté qui rend inévitable la détérioration de l’environnement, c’est la détérioration de l’environnement qui rend la misère inéluctable.

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photo2 : http://www.oca.eu/gemini/pagesperso/nardetto/Images_Planete/desertification_man.jpg

Bibliographie

Bied-Charreton, Marc, Raoudha Makkaoui, Olivier Petit, Mélanie Requier-Desjardins. S.d. «La gouvernance des ressources en eau dans les pays développés : enjeux nationaux et globaux».

Holtz, Uwe.2003. «La convention des Nations-Unies sur la désertification et sa dimension politique». En ligne.http://docs.google.com/viewea=v&q=cache:GsOPxvxnTZ0J:www.unccd.int/parliament/data/bginfo/PDUNCCD%28fre%29.pdf+conventions+internationales+d%C3%A9sertification&hl=fr&gl=fr&pid=bl&srcid=ADGEESg9xrtnGxn85oB_5SOguJ8lT6NEROuAQ7b8hixu9zjqNnlKN9vntdEMHwuazfZAqhYuKwI_JoHyWniS1PSAXp7pc8jBYyj5TUnH9AkS5i12eDA9E3Lvsm3XSbmQxfDNwhIIjyrq&sig=AHIEtbR23qIWLn0n9rFpN06AMZeIOk7u1g (page consultée le 2 février 2010)

Leon, Carlos, Nora Prudkin and Carlos Reboratti. 1985. «El conflicto entre produccion, sociedad y medio ambiente: la expansion agricola en el sur de Salta ». Desarollo economico.


[1] Uwe Holtz,« La Convention des Nations-Unies sur la Désertification et sa dimension politique», p.4.

[2] Id

[3] Leon, Nora Prudkin yCarlos Reboratti. «El conflicto entre produccion, sociedad y medio ambiente: la expansion agricola en el sur de Salta ». En ligne

[4] Marc Bied-Charreton, Raoudha Makkaoui, Olivier Petit, Mélanie Requier-Desjardins. «La gouvernance des ressources en eau dans les pays développés : enjeux nationaux et globaux». En ligne

[5] Uwe Holtz,« La Convention des Nations-Unies sur la Désertification et sa dimension politique».

[6] Uwe Holtz,« La Convention des Nations-Unies sur la Désertification et sa dimension politique».

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01

03 2010

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