LES BIOTECHNOLOGIES SAURONT-ELLES NOURRIR L’HUMANITÉ DU XXIÈME SIÈCLE?

Par Marie O’Neill

«1,5 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde, à l’aube du XXIème siècle»[1]. Ces chiffres alarmants ne semblent vouloir souffler qu’un seul mot : agir et ce le plus rapidement et efficacement possible. C’est pourquoi, vers la fin du XIXème siècle, les biotechnologies ont fait leur apparition. La biotechnologie selon la définition de l’OCDE, est l’application des principes scientifiques et de l’ingénierie à la transformation de matériaux par des agents biologiques pour produire des biens et des services[2]. Elle est le résultat de l’inquiétude générale vis-à-vis des capacités de la planète à nourrir ses habitants. Les biotechnologies dans le domaine de la sécurité alimentaire sont souvent décrites comme «le miracle menant automatiquement à la voie du développement économique»[3]. Cependant ce petit bijoux de la science contemporaine est loin de faire l’unanimité et suscite aujourd’hui une grande polémique. Dans quelle mesure les biotechnologies peuvent-elles sauver l’humanité de demain? Quelles sont leurs avantages? Quelles sont leurs limites? Quelles sont les mesures mises en place dans le but de les encadrer et de circonscrire les dégâts déjà visibles aujourd’hui?

La théorie constructiviste d’Arturo Escobar sur la déconstruction du développement rappelant, par exemple, les enjeux que soulève la surpopulation vis-à-vis de la sécurité alimentaire explique parfaitement l’apparition des biotechnologies. En effet, le constructivisme explique comment la hausse de la productivité via le développement des techniques agricoles ainsi que la coopération au niveau international sont des éléments essentiels à la résolution des problèmes de la faim dans le monde. De fait, les biotechnologies suscitent des questions et des réflexions ainsi que des prises de position à propos de l’évolution de la productivité des systèmes de production, sur les formes d’organisation de l’économie mondiale agricole ainsi que de la place des nouvelles technologies dans le concept de développement[4]. Car si la révolution verte et l’amélioration génétique des plantes cultivées engendre de nombreuses critiques en raison notamment de la fragilité des écosystèmes, on ne peut nier les effets positifs en terme d’hausse globale de la production agricole. Par exemple, en Inde : En 1965, on produisait douze millions de tonnes de blé sur quatorze millions d’hectares. En 1990, on en produit cinquante-cinq millions sur vingt-trois millions d’hectares. Pour avoir une idée de l’impact de la technologie sur la production agricole il faut savoir qu’avec les rendements qu’on obtenait en Inde en 1965, il aurait fallu cultiver plus de quarante millions d’hectares[5]. On observe donc que les biotechnologies apportent des améliorations concrètes dans le domaine agricole en plus de tous les autres domaines qui entrent dans les politiques de développement (santé, productions industrielles et énergies).  «Il faut reconnaitre le caractère indispensable de ces techniques pour nourrir l’humanité du XXIème siècle»[6].

blog2-photo1(photo1 :http://www.epo.org/aboutus/events/archive/2007/biotechnology/biotechnology.jpg)

Néanmoins, les dérives socio-économiques que les biotechnologies sont susceptibles d’engendrer inquiètent les agents du développement. De ce fait, elles se développent malencontreusement dans une structure cartellisée. Or cette cartellisation va provoquer une hausse notoire de la dépendance ainsi que de marginalisation des économies tiers-mondistes en créant un régime mondial désavantageux. De surcroît, l’égoïsme des Firmes Multinationales (FMN) l’emportera sur la sauvegarde de l’environnement, sur les politiques raisonnables de développement durable. L’échec du modèle agricole de la révolution verte qui aggrave la relation de dépendance des pays du Sud envers les pays du Nord va également fomenter la crise de la dette ainsi que la dégradation des systèmes de production.

Le scénario catastrophe présenté dans le texte de N. Patrick Peritore se poursuit ensuite par une très possible crise économique mondiale entraînant de nombreuses catastrophes diverses s’abattant sur la planète bleue (désertification etc.) ainsi que sur la population humaine (faim, épidémies etc.)[7]. Les biotechnologiques, perçues comme bien stratégique de premier ordre sont sur le point de se transformer en centre de lutte politique pour l’hégémonie du marché mondial. Les préoccupations pour l’équité sociale, pour le respect des contraintes écologiques de l’environnement et de la durabilité de l’agriculture sont donc au rendez-vous.

Ainsi donc, des organisations internationales, comme la FAO ont pris les choses en main ou tout du moins tentent de résoudre les problèmes liés à l’intégration des biotechnologies dans les marchés mondiaux. Car même si les problèmes sont urgents, on ne peut pas faire n’importe quoi et des réglementations sérieuses doivent être mises en place.  Tout d’abord, il faut donner de manière sine qua none de l’importance au «local». En effet, appliquer des solutions générales aux difficultés liées aux biotechnologies ne permet surement pas de trouver une issue valable, bien au contraire. Il faut apprendre à s’adapter aux contextes : prendre en compte le milieu (physique, biologique, humain : les richesses, les faiblesses et les potentialités). Il est également essentiel d’ajuster voir de créer des technologies qui vont de pair avec le milieu dans lequel on évolue[8]. De surcroît, une coopération entre les pays du Nord et ceux du Sud doit impérativement être établie. La convention du Gatt initie le mouvement dans ce domaine car œuvrer de concert semble être la base des initiatives internationales quant aux biotechnologies afin que «le progrès des uns ne fassent pas le malheur des autres»[9]. Finalement, les biotechnologies demeurent indispensables au mieux-être du monde de demain. La FAO lui octroie le pouvoir de doubler la production vivrière d’ici 2050. Et si elles rencontrent certaines difficultés qu’on ne peut se permettre d’ignorer, ces dernières ont été identifiées et font désormais l’objet de maints efforts dans le but de les résorber.

Grâce à une politique d’aide au développement multiforme et rationnelle menée dans la coopération sur la scène internationale, les biotechnologies sont le secteur clé des années à venir étant donné la contribution qu’elles sont susceptibles d’apporter à l’autosuffisance alimentaire ainsi qu’à la qualité de vie des agriculteurs et des consommateurs. C’est un fait, correctement utilisées, les biotechnologies représentent le commencement de la fin de la faim.

Bibliographie

Escobar, Eduardo. 1995. «The problematization of poverty: the tale of three worlds and   development». Encountering development: the making and unmaking of the third  world. Princeton: Princeton University press.

Lepoivre, Philippe. «Les biotechnologies végétales appropriées dans le contexte du dialogue Nord-Sud». En ligne.
http://www.fsagx.ac.be/pp/Actualit%3Fs/Les%20biotechnologies%20et%20le%20dialogue%20Nord%20Sud.htm (page consultée le 2 février 2010)

OCDE. 2004. Les biotechnologies au service d’une croissance et d’un développement  durable. Paris : Éditions de l’OCDE. En ligne.

http://docs.google.com/viewera=v&q=cache:O9ro_qgGuSYJ:www.oecd.org/dataoecd/60/41/23536385.pdf+les+biotechnologies&hl=fr&gl=fr&pid=bl&srcid=ADGEESjChuCsH2BomHB2PxCAG2JPDDwPOTyNwtWrIZXvU_Sb2fikhPUr-GVztyZxFPR7rlWvdm9AKK8pljbl0XkPqTqI5r2AH3hKBetEZb6AcYuyBRfBsI3tRCLMv0xGL_nFBa3TdOcO&sig=AHIEtbR3Vtpk_yN5QEKlKNoXFjfdk5JmvQ (page consultée le 16 mars 2010)

ONU. FAO. 2010. Il faut mettre les biotechnologies au service des travailleurs pauvres. En ligne. http://www.un.org/apps/newsFr/storyF.asp?NewsID=21334&Cr=FAO&Cr1 (page consultée le 16 mars 2010)

Peritore, N. Patrick and Lili Buj Niles. 1992. «El surgimiento del cartel biotecnologico».  Revista mexicana de sociologia. En ligne.   (page consultée le 2 février 2010)


[1] Eduardo Escobar, The problematization of poverty: the tale of three worlds and development. (Princeton: Princeton University press, 1995).

[2]OCDE, Les biotechnologies au service d’une croissance et d’un développement durable (Paris : éditions de l’OCDE, 2004).

[3] Philippe Lepoivre, Les biotechnologies végétales appropriées dans le contexte du dialogue Nord-Sud. En ligne.

[4] Philippe Lepoivre, Les biotechnologies végétales appropriées dans le contexte du dialogue Nord-Sud. En ligne.

[5] Ibid.

[6] Philippe Lepoivre, Les biotechnologies végétales appropriées dans le contexte du dialogue Nord-Sud. En ligne.

[7] N. Patrick Peritore y Lili Buj Niles, El surgimiento del cartel biotecnologico (1992). En ligne.

[8] OCDE, Les biotechnologies au service d’une croissance et d’un développement durable (Paris : éditions de l’OCDE, 2004).

[9] Ibid.

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04 2010

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