L’ÉVOLUTION ÉCONOMIQUE DE LA COLOMBIE

Par Laetitia Rampazzo

La Colombie est aujourd’hui considérée comme une puissance économique en Amérique latine. Indépendant depuis 1830, le pays a néanmoins connu les stigmates de la dictature et des rébellions qui en découlent, telles que la guerre civile ou la propagation de la mafia.

Avant d’engager de grandes réformes économiques au début des années 1990, la Colombie disposait d’un système qui fut qualifié par le président de l’époque, César Gaviria, comme « obsolète », et c’est pour cela que lors de sa campagne électorale en 1990 il promit une réforme en profondeur de ce système. Ce billet a pour but de retracer le chemin qui fut parcouru par la Colombie sur le plan économique durant les années 1990, ainsi que ses différentes étapes clés, en effet c’est à travers ses événements que le pays est aujourd’hui devenu la cinquième puissance du continent sud-américain.

Cette promesse semble rappeler la théorie de la modernisation[1], de W.W Rostow, de part  l’accent mit sur l’économie et son évolution, mais également par le contexte historique. Selon lui chaque société passe par l’une des cinq phases suivantes : la société traditionnelle, les conditions préalables au démarrage, le progrès vers la maturité, et l’ère de la consommation de masse. Dans le cas ici présent, la théorie se développa fortement pendant la période de la guerre froide ainsi que lors de la lutte anticommuniste, or, selon Sebastian Edwards dans son étude pour le Centre de Développement[2] , la Colombie a la particularité d’avoir eu un système économique similaire en certains points avec les systèmes socialistes centralisés. Soulignons cependant que ce pays ne fut jamais considéré comme communiste. Peu après l’élection de César Gaviria, le gouvernement entama diverses transformations du système économique. Le président élu avait pour ambition de rendre son pays plus compétitif sur la scène internationale, et l’un des moyens pour y parvenir consistait à s’appuyer sur l’aide d’organismes gouvernementaux ou encore des hautes autorités économiques de ce monde, tels que le FMI.

Dans l’optique de moderniser son économie quelques points stratégiques furent touchés tels que la suppression des contrôles des changes, la réforme de la législation du travail ou encore la libéralisation des échanges. Ces réformes furent pour nombre d’entre elles contestées, faisant débat, mais elles permirent à la Colombie de se rendre plus accessible aux investisseurs étrangers. Ce qui amène à comparer les mesures misent en application ainsi que leur rythme d’installation avec les préceptes de la théorie de la modernisation. En effet, la deuxième phase expliquée par W.W Rostow se nomme  « conditions préalables au démarrage (ou décollage) » et correspond en plusieurs points aux méthodes employées par Gaviria :

On note tout d’abord que ce type de développement ne peut se faire, toujours selon W.W Rostow, que par un choix politique et économique, ce qui rejoint alors l’idée de progrès économique dans l’optique d’accélérer la croissance et redorer le blason colombien au niveau international, ce qui nous conduit à l’une des caractéristiques de cette théorie, l’utilisation de capitaux importés. Il faut savoir que le marché colombien était extrêmement difficile à pénétrer avant les réformes des années 1990, d’une part par les nombreux contrôles qui étaient fais et rebutaient les potentiels investisseurs, mais également par le taux de change réel, nécessitant une dépréciation afin d’être plus attractif. Cependant l’administration Gaviria connu des échecs, notamment via le développement de sa réforme commerciale, qui fit chuter les importations et dérégla le court du taux de change, ce qui ébranla quelque peu le gouvernement et sa soif de réforme, même si le président avait prévenu que les transformations seraient faites à un rythme modéré. Cela le poussa, toujours à travers les attraits de la mondialisation, à l’ouverture à l’internationale au risque de se rendre plus vulnérable face à l’invasion probable de concurrents venus de pays développés et industrialisés, pouvant se permettre d’inonder le marché par des prix plus compétitifs et ainsi freiner le développement interne. Néanmoins, il s’agissait là d’un risque à prendre, ces mêmes « concurrents » pouvant également implanter leurs entreprises dans le pays, créant un cercle vertueux à court terme, mais poussant tout de même à une transition vers le développement. Ce risque fut pris en 1991 par la baisse des droits de douane et l’abandon des licences d’importations.

On parle alors de libéralisation des échanges.

Les modifications précédentes conduisirent à une nouvelle constitution. Alors qu’elle repris de nombreux préceptes, certain y voyait un rapprochement avec la théorie de la modernisation, permettant la mise en place d’une nouvelle classe d’entrepreneurs privés les gremios, personnes ayant eu un rôle important dans le développement économique et politique du pays. Mais encore une fois ce qui semblait fonctionner en théorie s’avérait différent dans la réalité. Les mesures prisent par le gouvernement dans le processus de libéralisation des échanges ont été considérées comme les plus exceptionnelles jamais prisent sur le continent sud-Américain, mais les inconvénients qu’ils leurs étaient possibles d’entraîner semblaient trop importants. Le gouvernement dû céder sur plusieurs terrains, mais le président restait persuadé de l’urgence et de la nécessité de ses réformes, ce qui conduisit au processus de décentralisation, processus clé de la constitution de 1991 ayant pour but de lutter contre les guérillas et les trafiquants, et encore en action de nos jours, ce qui sera étudié dans un prochains billet.

Aujourd’hui cinquième puissance d’Amérique latine, la Colombie n’en reste pas moins épargné des fléau à la fois économiques, politiques et sociaux qui secouent les pays en voie de développement, les transformations profondes qui y ont été opérées ces dernières années sont encore « neuves » et n’ont pas terminées d’influencer le fonctionnement du pays.

Reste à voir comment ce pays plein de potentiel évoluera et si les choix d’hier et d’aujourd’hui sont les bons. Mais tout comme le montre les critiques de la théorie de la modernisation, existe-t-il seulement un pays aux choix irréprochables ?

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[1] http://science.jrank.org/pages/10273/Modernization-Theory-Defining-Modernization-Theory.html

[2] Etudes du Centre de Développement Environnement économique et politique de transition vers une économie de marché: Colombie (Edition complète – ISBN 9264295232)

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02 2010

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